mardi 9 avril 2024

Dans les cieux… (2)


Pieds nus osant

à peine marcher

sur une ligne inconnue

dans un scintillement

mouvant et pourtant

immobile, trace fugace

funambules d'un soir

sur ce qui reste

de l'océan

qui se retire…

 JeanPaul

samedi 9 mars 2024

Dans les cieux… (1)

 

C'est une belle journée

qui s'achève

peut-être aurions-nous

pu mieux faire

partie du monde

et nous plonger

dans ces cieux du couchant

inattendus

à notre retour

D'après Papiers d'identité de Franck Venaille

lundi 26 février 2024

Feuilles… (7)

Violettes

Et les violettes elles-mêmes, écloses par magie dans l’herbe, cette nuit, les reconnais-tu ?
Tu te penches, et comme moi tu t’étonnes ; ne sont-elles pas, ce printemps-ci, plus bleues ?
Non, non, tu te trompes, l’an dernier je les ai vues moins obscures, d’un mauve azuré, ne te souviens-tu pas ?

 

Plus mauves… non, plus bleues…
Je revois des prés, des bois profonds que la première poussée des bourgeons embrume d’un vert insaisissable, des ruisseaux froids, des sources perdues, bues par le sable aussitôt que nées, des primevères de Pâques, des jeannettes jaunes au cœur safrané, et des violettes, des violettes, des violettes…

Colette

https://arbrealettres.wordpress.com/2017/12/30/violettes-colette/ 

jeudi 25 janvier 2024

Feuilles… (6)


Dans orange

Il y a or

Or il n'y a pas d'or

Dans l'orange

C'est orange une orange

L'or est dans la bouche

Qui la mange.

 

Dans orange il y a ange

Pourtant il n'y a pas d'ailes

à ses feuilles

Sinon elle quitterait la branche

Pour goûter les autres couleurs

Dans les airs.

 

La pomme sur le côté

lundi 11 décembre 2023

Feuilles… (5)


Feuille d'automne

 

Quand le fleuve m’appelle

quand l’eau est miroir

quand la bouée rouge

nargue en vain le ciel

 

quand je file vers la ville

quand mon regard défile

quand mon souffle buée

s’égare et perd haleine

 

une feuille au sol

se dresse, clignote

et m’arrête soudain

inscrit en lumière…

JeanPaul

jeudi 23 novembre 2023

Feuilles… (4)

Le vent s'est posé au bord du miroir de l'eau

les feuilles mortes des bouleaux s'abandonnent

le vent dur et sauvage de novembre est sans pitié

le vent mord les branches peu à peu dénudées

le bassin au centre du square se fige, s'endort

deux feuilles perlées d'automne semblent nager

nonchalant, patiemment, novembre s'installe…

https://www.lyon.fr/lieu/jardins/jardin-du-palais-saint-pierre

mardi 10 octobre 2023

Feuilles… (3)

Notes pour plus tard

rien de particulier

un son long lointain

les pétales des arbres

qui tombent avec le vent

bientôt le feu

bientôt la pluie

rien de particulier non

rien de spécial si ce n'est

le fait que nous sommes

là — vivants —.

D'après Debout dans les fleurs sales de Thomas Vinau

jeudi 21 septembre 2023

Feuille(s)… (2)

 

 

La feuille d'or

 

La nature s’endort
Sur un arbre mort
Dans le froid qui mord
Reste pour décor

Une feuille d’or

Dans le vent du nord
Elle salue l’aurore
Et le soleil d’or
Qui se lève encore


 

Alain Hannecart

dimanche 17 septembre 2023

Feuille(s)… (1)

avec des bouts de ficelle

avec des rognures de bois

avec de tout, tous les morceaux bas

avec les coups bas

avec des feuilles mortes 

ramassées à la pelle

avec des restants de draps

avec des lassos lacérés

avec des mailles forcées de cadène

avec des ossements de murène

avec des fouets arrachés

avec des conques marines

avec des drapeaux

et des tombes dépareillées

par rhombes

et trombes

te bâtir

Aimé Césaire

Les maillons de la cadène


vendredi 8 septembre 2023

En fleurs… (5)

 

 

Rose d'été

Été : être pour quelques jours
le contemporain des roses ;
respirer ce qui flotte autour
de leurs âmes écloses.

 

Faire de chacune qui se meurt
une confidente,
et survivre à cette sœur
en d’autres roses absente.

 

Rainer Maria Rilke

Les roses

dimanche 23 juillet 2023

En fleurs… (4)

 

Une rose seule, 

c'est toutes les roses

 

Une rose seule,

c'est toutes les roses

et celle-ci :

l'irremplaçable,

le parfait,

le souple vocable

encadré

par le texte des choses.


 

Comment jamais dire sans elle


ce que furent nos espérances,

 
et les tendres intermittences


dans la partance continuelle.

 

Rainer Maria Rilke

 

jeudi 15 juin 2023

En fleurs… (3)


 

Le lys d'or du lac de Frace

Hors des chemins de poussières et de bruits

le lac dans son écrin de fraîche verdure

nous accueille en silence et toute simplicité

invitation à flotter entre ses eaux et l’azur

 

Un oblique rayon nous atteint et décline

les riches heures teintées d’éternité

sur le sol herbeux, tendre et moelleux

nos corps frémissent avec la canopée

 

Plus loin comme piqué sur la berge inerte

noble et pur, un grand lys lance son or et

attend sans crainte l’arrivée certaine de la nuit

 

JeanPaul

jeudi 25 mai 2023

En fleurs… (2)


 

Il y a des fleurs au fond de la mer

Qui ne poussent pas vers le soleil

Et dont aucun vent ne remue les feuilles

Mais le souffle de l’eau, le flux

Et le reflux du jour et de de la nuit

 

Je cherche à dire et à nommer

Sans conclure, sans enclore

Sans preuves je cherche encore

Sans même un espoir de trouver

Creusés dans la terre noire

Où vont pourrir nos os

Il reste quelques puits d’eau claire.

 

 

Jean-Michel Maulpoix

Profondeurs in Rue des fleurs

mardi 9 mai 2023

En fleurs… (1)


Elle tient ses cheveux se place

Sous la lampe qu'il avance

Comme s'il faisait beau un doux soleil

Il pose son autre main plus loin dans l'ombre

La fenêtre est bien ouverte maintenant le soir

La couverture sent les fleurs de la journée

Ariane Dreyfus

Tu as sommeil ? Extrait de Nous nous attendons

samedi 25 mars 2023

État de marche… (3)


Mes paumes poussent le ciel
Qu'en tombe un oiseau bleu
Dans une boîte vocale
J'ai fait mes armes
En suivant les éphémérides
Suivant le vent
J'ai fait mon lit
De l'érosion
Un oisillon
À mon réveil
Est là
Dans ma main droite
Mes paumes poussent le ciel
Qu'aille l'oisillon bleu.
 
Arthur Teboul
À mon réveil
Dans Le Déversoir. Poèmes minute

dimanche 12 mars 2023

État de marche… (2)

 

Il souffle mille voix de vent

sur la montagne que traversent

des marées       tant d'aubes

un silence de fin de jour

quand s'amorce la descente

vers soi

au-dessus du vide

flotte un ciel

qui n'ignore pas sa fragilité

murs d'incertitude et miroir

déformé de nos rêves

Hélène Dorion

Extrait de L'onde du chaos,

dans Mes forêts

mercredi 22 février 2023

État de marche… (1)

On peut être assis
on peut être debout
On peut rester sur place
en étant assis
ou rester sur place
en étant debout.
On peut être en mouvement
pour avancer
ou peut être en mouvement
pour bouger sur place.
On peut avancer
en étant debout.
On peut avancer
assis lentement
on peut avancer assis
à très grande vitesse.
On peut avancer debout
sans bouger les pieds
on peut avancer debout en marchant.
Laurence Vielle, extrait d'État de marche, in Billets d'où

mercredi 18 janvier 2023

Mot (7)


Signe

 

Il n’y a aucun signe à attendre

De quelque horizon qu’il vienne

Et quelles qu’en soient la lueur ou la promesse

 

Ce signe qui appartient seulement au cours des choses et des êtres

 

Sans autre destination que de renier le présent à l’instant même où il apparaît

 

Surtout quand il annonce l’éternité

 

Jacques Lelong

jeudi 15 décembre 2022

Mot (6)

Libre

 

Être libre

 

Mais de quoi être libre ?

De quelle structure ?

De quel engrenage ?

 

Mais, surtout, de quel questionnement ?

Et libre de quelle impossibilité d’être,

s’il n’y a pas de réponse ?

 

Libre de ce qui est autre que soi ?

Et qui empêche d’être soi-même ?

 

Ou alors faut-il être libre de soi seul ?

 

Non, ce qui importe,

c’est tout simplement,

d’être libre de l’idée de liberté.

Jacques Lelong

mercredi 7 décembre 2022

Mot (5)


Fruit

 

Sans origine et sans destin,

de quoi le fruit premier est-il le fruit ?

D’un  don qui,

né du néant, soit un dû ?

Ou bien d’un don 

qui réponde à un don ?

Et qui établisse pour longtemps 

l’échange donnant vie à la vie ?

Et donnant vie à l’amour…

 

Oui, c’est bien là

le destin du fruit

 

Jacques Lelong

“Un poète doit laisser des traces de son passage non des preuves. Seules les traces font rêver.”

René Char